Les limites de la Liste Rouge
La Liste Rouge joue un rôle essentiel pour la préservation des espèces en danger. En effet, elle attire des millions de dollars vers la conservation de certaines espèces et est également un outil de lobbying pour inciter les gouvernements à agir. Cependant, le classement d’une espèce dans la Liste Rouge est remis en question pour plusieurs raisons.
Pour certains, la Liste Rouge a tendance à surestimer le négatif et à sous-estimer le positif. En particulier, elle véhiculerait une vision trop pessimiste des efforts consentis par les pouvoirs publics en termes de conservation de la biodiversité. En effet, l’allongement de la liste, année après année, peut être perçu comme la démonstration de l’inefficacité des politiques consentis par les pouvoirs publics. Sous l’impulsion des détracteurs de la Liste Rouge, une « liste bleue » s’est développée afin de mettre en valeur le travail des pouvoirs publics. Elle comprend les espèces de la Liste Rouge qui, grâce à des politiques de protection, ont vu leur risque d’extinction s’amoindrir. C’est aussi un moyen de motiver les pouvoirs publics à poursuivre leur action.
La Liste Rouge est également critiquée pour ses imperfections et ses méthodes de collecte, d’agrégation et d’analyse des données. Un nombre croissant de scientifiques réclame davantage de rigueur, de précision et moins d’amateurisme dans son élaboration. Ces accusations pointent la mise en danger de certaines espèces en danger qui seraient classées de manière inadaptée, tandis que de l’argent et des efforts sont employés pour la sauvegarde d’espèces sans risque. On reproche aux critères de l’UICN d’apporter des résultats surprenants. Par exemple la tortue verte a été cataloguée "en péril" alors que l’espèce comprend deux millions d’individus. De tels reproches sont surtout fait en ce qui concerne le classement du cachalot ou d’autres espèces de tortues marines.
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Une autre question est celle du degré variable de pertinence de la liste suivant les espèces. En effet, les seuils définissant les risques relatifs à une espèce quelle qu’elle soit sont adaptés aux mammifères. C'est pourquoi certains spécialistes proposent d’adapter l’échelle de risque utilisée à des groupes taxonomiques spécifiques, ce qui toutefois rendrait difficile la comparaison des risques d’extinction des différentes espèces.
La Liste Rouge est aussi fustigée en raison d’une tendance à se conformer au principe de précaution, parfois au détriment des principes scientifiques. Ceci a pour conséquence que les groupes de spécialistes chargés d’établir la liste exigent des niveaux de preuve plus élevés pour une augmentation des effectifs d’une espèce que pour leur diminution, ce qui tend à exagérer les risques d’extinction.
Pour de nombreuses espèces, un manque de données entraîne l’absence d’évaluation des risques d’extinction les concernant. C’est le cas pour le dauphin d’Amazonie par exemple qui est passé de la catégorie "Vulnérable" à la catégorie "Données Manquantes". En conséquence, « des espèces en danger mais pour lesquels les données sont jugées insuffisantes peuvent être négligées en termes de gestion de la conservation », selon Steven Garett, de l’Université Charles Darwin dans la ville de Darwin en Australie.
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Beaucoup récusent aussi l’insuffisante prise en compte du doute lié à l’analyse des données et au classement des différentes espèces de la liste. En effet, les décideurs politiques mettent en œuvre des politiques de conservation sans considérer les incertitudes du classement de la Liste Rouge.
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Pour le spécialiste Graham Webb, chercheur à l’Université Charles Darwin, « la Liste Rouge est un instrument pour la conservation incroyablement puissant et innovateur, mais il a besoin de continuer à s’améliorer et de devenir plus précis ».